Journal de Bord
Tous les articles
Grand format

Enfin, un beau millésime !

Les années en 5 donnent de beaux millésimes et 2025 ne déroge pas à la règle. Après plusieurs années marquées par les aléas climatiques, le vignoble nantais a vécu une campagne sereine aboutissant à une vendange d’une rare précocité et remarquable d’un point de vue sanitaire. Entre vignes et chais, vignerons, élus et techniciens, nous partagent leurs impressions sur ce millésime. 

Christophe Vilain, vigneron au Loroux-Bottereau et président de la Fédération des Vins de Nantes
« Le ban des vendanges a été historiquement précoce. Pas autant que 2023 où il avait été prononcé le 19 août mais dans la même lignée. La qualité est magnifique avec un état sanitaire extraordinaire. On a des degrés superbes et des acidités qui se maintiennent ce qui donne de beaux équilibres. Les vins auront sans doute un peu plus de couleur en raison de l’ensoleillement de cet été. On pensait récolter des volumes plus importants. Les estimations d’il y a quelques semaines ont été revues à la baisse avec le manque d’eau. Cela va tout de même nous permettre de refaire légèrement les stocks qui sont au plus bas. Entre les volumes récoltés et la nécessité de refaire un peu de stock, la production avait souhaité une revalorisation des prix d’achat des raisins et moûts de la récolte 2025. Les négociations de prix entre vignerons et négociants dans le cadre de la loi Egalim n’ont pas été à la hauteur des espérances de la viticulture. La voie de la revalorisation est pourtant indispensable pour que les exploitations viticoles puissent maintenir dans les années à venir un partenariat viable économiquement avec les Maisons de négoce »

Joël Forgeau, vigneron à Mouzillon, président du pôle ODG à la Fédération des Vins de Nantes
« La saison s’est déroulée de manière idéale avec un débourrement classique, pas de gelées, une très belle floraison, rapide, et l’été s’est passé comme dans les livres, avec du beau temps. La qualité sanitaire est au rendez-vous donc tout est fait pour faire un beau millésime, solaire, de garde. La moins bonne nouvelle, c’est que l’on s’attendait à pouvoir refaire les stocks et c’est assez compromis à cause de l’initiation florale de l’année dernière qui ne s’est pas faite dans de bonnes conditions. On est à un niveau de stock proche de celui de juillet 2022, consécutif à la petite récolte 2021. Même chose pour les sorties de chais, elles seront similaires à celles de la campagne 2021/2022 même s’il faudra attendre encore quelques semaines pour avoir les chiffres définitifs. Pour notre vignoble, il est donc impératif de gagner en valeur et c’est tout l’objet des travaux actuellement menés par la Fédération des Vins de Nantes, la chambre d’agriculture et le Syndicat des Vignerons Indépendants Nantais. »

Hervé Choblet, vigneron à Bouaye en Côtes de Grandlieu
« Les anciens disent toujours que les années en 5 donnent des beaux millésimes. Cela se confirme encore cette année. C’est l’un des millésimes les plus précoces que l’on ait connu avec un état sanitaire aussi bien feuillage que grappe, exceptionnel. Il y a un an, nous étions moins sereins. Comme quoi, il faut rester confiant. Quand j’ai commencé, il y a une trentaine d’années, la norme, c’était de récolter mi-septembre. Aujourd’hui, mi-septembre, on est déjà tardif, comme l’an dernier. Le cycle végétatif raccourci, sans pour autant démarrer plus tôt. Entre le début de la véraison et la maturité, on a eu 4 semaines, c’est du jamais vu ! Au niveau des volumes, on est un peu en deçà de qu’on espérait avec le manque d’eau durant l’été. Il n’y a pas pléthore mais il y en aura suffisamment pour alimenter les marchés. D’un point de vue économique, la situation est un peu compliquée. Ce n’est pas lié à la récolte mais aux marchés et à la baisse de la consommation qui est selon moi, le problème numéro 1 de la viticulture. »

Benoît Landron, vigneron à Ancenis Saint-Géréon et président des Coteaux d’Ancenis
« On a la chance d’avoir un millésime précoce et on retrouve énormément de la finesse dans les vins. Si on le compare à 2022 qui est la dernière année chaude, on retrouve des choses beaucoup plus fines alors que 2022 était plus costaud. On est sur des notes de fruits mûrs avec de la fraîcheur et des acidités plutôt basses. On a tout pour faire de beaux vins et un très grand millésime. Au niveau des rendements, on sera dans les moyennes. Ce n’est pas pléthorique car la vigne reste traumatisée par la flotte de 2024. Ceux qui ont attendu un peu pour les Malvoisie auront un peu plus avec la pluie tombée début septembre. Cela devrait donner de très bons résultats. Nous goûtons tous les ans 100% des lots produits avant leur mise en marché, attendons nous à un niveau exceptionnellement haut de réussite. »

Stéphane David, vigneron à Vallet, président du comité de pilotage des appellations communales
« Le millésime est dans un très bel état sanitaire. Cela fait longtemps que nous n’avons pas eu un état sanitaire comme celui-ci. On a un vignoble beau et sain, ce qui laisse présager de belles sorties pour l’année prochaine, sachant que les inflorescences du millésime futur se font dans le mois de juin précédent. C’était d’ailleurs la problématique du millésime 2025 après une année 2024 pluvieuse. Cette récolte nous permettra de proposer des appellations communales, ce qui n’avait pas été le cas l’an passé. Je n’ai pas encore les retours de tous les secteurs mais je pense que si on fait une moyenne autour de 40hl/hl, ce sera très bien. On devrait par ailleurs avoir un millésime qui devrait ressembler à 2015 ou 2019 avec des vins dits « solaires », c’est-à-dire un peu plus chauds tout en gardant de la minéralité, et avec des notes de fruits confits, davantage que de fleurs blanches. »

Romain Mayet, ingénieur à la Fédération des Vins de Nantes
« C’est un millésime exceptionnel en termes d’état sanitaire, de précocité et de degrés. A la mi-août nous avions des degrés sans équivalent dans l’histoire du réseau, à plus de 11 % Vol.  2003 et 2022 sont deux années de références en termes de précocité, de chaleur et d’acidité très basses. En 2003, on avait lancé le ban le 19 août mais avec des degrés inférieurs à cette année. Aujourd’hui, les vignerons sont en mesure d’attendre. Les critères de fixation du ban ne sont pas les mêmes avec 25 ans d’écart. Reste à savoir si ce côté exceptionnel sera amené à perdurer dans les années à venir. Cette année le débourrement était plutôt dans la norme, mais s’il est plus précoce, qu’il n’y a pas de gel printanier et avec un été similaire à cette année, on pourrait vendanger la première quinzaine d’août. C’est ce qui nous attend un jour ou l’autre. »

Florent Banctel, conseiller viticole à la chambre d’agriculture
« Je n’ai jamais vu la vigne aussi belle à cette époque de l’année ! Au niveau sanitaire, du feuillage et des grappes, c’est très beau. Forcément on a un peu d’hétérogénéité au niveau de la sortie de grappes, conséquence de l’an passé. D’après les premiers retours, les rendements sont variables suivant la répartition des pluies, allant du simple au double. J’ai fait des pesées de grappes et on a eu de très belles surprises avec des raisins bien gonflés sur pas mal de parcelles. Il faut bien remarquer que dans ce genre d’année, la fertilité du sol et la vigueur de la vigne sont cruciales. Bien sûr, les parcelles sans ceps manquants font plus facilement les rendements. Au niveau qualitatif, on a globalement de beaux équilibres, même si l’acidité tend un peu à manquer parfois par rapport au degré d’alcool potentiel. En tout cas, il faut se rendre compte que la vigne est belle et savoir en profiter parce que le vignoble subit des aléas, sanitaires, climatiques, des choses difficiles à vivre. La vigne va également partir sur de bonnes bases pour 2026. Il y a eu globalement de bonnes conditions à la floraison, au niveau de l’induction florale et la mise en réserve va se faire dans de très bonnes conditions. »